Le soleil avait encouragé la sortie de ces machines qui sont de plus en plus sophistiquées. Des nuages de poussières trahissaient leurs positions dans la campagne flamande.
La moissonneuse batteuse MF 7270 BETA était elle-même en train d'avaler les hectares de blé.

Les "compagnons" indispensables étaient là aussi : de superbes MF 6245 et 6480, couleur rouge vif de cette marque qui a bercé mon enfance, Massey Ferguson.

Sur des grandes pièces de plusieurs hectares de blé, il faut les découper en parcelles afin de permettre au gibier de s'échapper. Chaque parcelle est ensuite dévorée par cette superbe machine dotée des dernières technologies.

Avec ses 6,70 mètres de coupe, elle avale 2 hectares à l'heure, avec une vitesse moyenne de 3,5 kilomètres/heure. Une fois réglée et mise en auto, la hauteur de coupe sera ajustée en fonction du terrain.

La trémie contient 9000 litres. Vers les 72%, un signal sonore et un signal lumineux sont émis par la machine vers le tableau de contrôle. Lorsque la trémie est plein, un klaxon retentit et le battage s'arrête. Il est temps de rejoindre les remorques pour vider le grain. Avec une vitesse d'extraction de 105 l/s, la trémie est vidée en 90 secondes environ.

Pour le blé couché par les orages, la hauteur des rabatteurs est ajustée depuis le poste de pilotage.
C'est la première fois que je monte dans une telle cabine. Mes dernières souvenirs me rappelent que nous n'avions pas de cabine et que le soir, nous étions couvert d'une fine couche de poussière ...

Et des bêtes à plumes et à poil, il s'en est échappé de chaque parcelle. Certains ont filé droit devant alors que d'autres longeaient la lisière du blé pour retourner se mettent à l'abri dans le champ de blé. Lapins, lièvres, perdrix, poules faisannes seront les espèces observées.


L'agencement de la cabine nous ferait presqu'oublier que nous sommes dans une machine agricole ! Assis sur un siège à suspension pneumatique, Cyril - que j'ai eu le plaisir de revoir aujourd'hui mais avec trois années de plus ! (voir article rédigé en août 2005 sur la moisson en Flandres) - balaye sans cesse de son regard la table de coupe, tout en optimisant la coupe même.

Sur l'accoudoir droit, le mono-levier de commande hydrostatique et toutes les commandes de la moissonneuse que Cyril caresse du bout des doigts pour agir sur les rabatteurs, sur la hauteur de coupe éventuellement.
Lorsque je lui ai posé cette question : "A quoi penses-tu ?"
Celui-ci en me répondant "A rien", m'a rassuré ! Au moins, cet état d'esprit n'a pas changé. Une fois plongé dans ce travail comme dans les travaux de la ferme en général, on s'évade et par voie de conséquence, on "s'éloigne" des problèmes qui sont le sel et le poivre de nos vies, quelles soient celles d'ados, ou d'adultes.
Cette cabine, c'est notre havre de paix. Même le bruit du moteur nous semble moins agressif que les voix de nos proches qui ont toujours des choses à nous confier, histoire que l'on ne s'ennuie pas !
J'ai passé pratiquement deux heures à ces côtés, échangeant quelques mots afin de ne pas le distraire.
A son contact, j'ai su pourquoi le propriétaire lui confiait une telle machine. Et ce n'est pas seulement parce celle-ci est truffée d'électronique, de capteurs ... qui lui font dire que c'est une machine de jeunes :-)
Non, il y a aussi cette confiance que l'on place, cette confiance que l'on m'avait donné également lorsque j'avais son âge.

Et voici Florence, ma "Princesse de la Moisson" ! avec son papa à ses côtés.
Elle aussi, a pris trois années de plus.
Fini le temps où Gilles, son papa, l'accompagnait aux différentes coopératives pour livrer le blé ! Non, là ... elle est heureuse : elle y va seule, accompagnée seulement par cette confiance que lui donne le propriétaire. Elle mets un point d'honneur à honorer celle-ci. C'est aussi une école de vie qu'il lui procure.
Au volant de "son MF 6480", elle amène sous la goulotte de la MF 7270 BETA une benne deux essieux qui recevra une bonne quinzaine de tonnes de blé. Elle aussi, tout comme Cyril, a les yeux qui brillent ... et si l'on y regarde de plus près, on y voit leur bonheur.
Cette manoeuvre ne dure que quelques minutes, car une fois la trémie vide, Cyril repart à l'attaque des épis de blé qui semblent résignés ... ils baissent leur tête :-)
Lorsque je regardais la table de coupe, je m'imaginais ces épis, pressés d'aller voir à l'intérieur de la machine ce qui s'y passait. J'avais même dit à Cyril : "Ils doivent apprécier, car aucun ne ressort ! :-)

Au bout de ces quelques heures, la grande pièce de blé était terminée. Un autre champ, mais beaucoup plus modeste en superficie, nous attendait. Malgré la proximité de celui-ci, la table de coupe devait être démontée ... 6,70 mètres sur la route, c'est quand même risqué !
La remorque était en attente de recevoir la table de coupe.

Gilles guide par petits gestes Cyril dans ses approches.


Là, il lui demande de descendre la table puisque celle-ci s'est bien présentée, sous le regard du propriétaire.
Quelques flexibles à enlever, et la MF 7270 BETA peut se retirer en laissant sa table de coupe verrouillée sur la remorque.
C'est une opération qui ne dure que quelques minutes ... si la manoeuvre est menée de main de maître.

Doucement la machine recule ...



Effectivement ! Elle est moins belle sans sa table !

Mais au moins, elle peut prendre la route après avoir mis à la place de celle-ci, un panneau réglementaire : "CONVOI AGRICOLE"

Et notre Princesse de la Moisson, qui a volontairement resté à l'écart ... c'est vrai qu'il y avait un paparazzi dans le coin :-) ... s'empresse de rejoindre le prochain champ.

Arrivé 400 mètres plus loin, il nous faut remettre en place la table de coupe. Cette opération ne prendra pas plus de temps que l'autre, toujours sous le regard du propriétaire. Tout a été conçu sur cette machine pour réduire les temps d'immobilisation.
C'est presqu'un jeu d'enfant que de se séparer de cette table.



Gros plan sur le système d'accrochage de la table de coupe.

Cyril peut lever la table et repartir à l'assaut des épis résignés :-)

Sauf que là, comme c'est une petite pièce, la tâche est dévolue à Gilles qui connaît les moissonneuses batteuses depuis ses 14 ans ... et aujourd'hui, il en a ... Au fait, tu as quel âge Gilles ?

Ah ! ça commence fort ! La machine a bourré ... comment cela peut-il arriver ? Aurais-je des ondes négatives sur mon Gilles !!!
Il y a quand même une explication : le terrain était miné !!! Si,si ... par des taupes ! Et comme Gilles aime bien aller au plus près des choses, et bien là, à force de raser le sol, il a emmené les taupinières avec lui ! :-)

Pendant que mon ami Gilles débourrait la table de coupe, moi je savourais les 21° de la cabine de pilotage ! Ah, la climatisation ! Encore une superbe avancée technologique ... pendant qu'à l'extérieur, Gilles connaissait les 30° que cette journée nous donnait.

Et encore une remorque pleine que la Princesse de la Moisson s'empresse de livrer à la coopérative de Bourbourg, accompagné par Cyril.

Même le voisin du champ fut intéressé par cette superbe moissonneuse batteuse de haute technologie ... à moins qu'il cherchait tout bonnement à se mettre au frais ! dans la spacieuse glacière :-)



La goulotte déverse le blé à 4,45 mètres de haut.


Cette fois, c'est Cyril qui conduit le MF 6480, notre princesse ayant décidée de se désaltérer avec une boisson bien fraîche ... Eh oui ! On est paparazzi ou on ne l'est pas ! :-)

Issue d'une technologie développée par Massey Ferguson il y a plus de 25 ans, la table PowerFlow est capable d'affronter des cultures aussi difficiles à récolter comme le seigle, les pois, le colza ... et bien sûr le blé.

Remarquez les patins d'usure de fond de coupe !
La table sur ces moissonneuses Beta est équipée de série du dispositif Autodévers permettant de suivre les dénivellations de la parcelle jusqu'à 8 %
Visibilité et optimisation de la lame de coupe qui se trouve à 1,14 m de la vis de table, contrôle automatique de la hauteur de coupe de série depuis le moniteur Agritronicplus ... Bref que du confort dans cette machine.

A l'arrière, le broyeur de paille optimisé lui aussi, disperse la paille réduisant ainsi les opérations de l'après moisson.


Voilà la photo ! Une Princesse qui se laisse aller !!! Elle est très certainement en train de rêver, blottie contre le beau MF 6245. A quoi pense-t-elle ? Ah! mystère !!!
Bon, je te rassure quand même Florence, je devais produire cette photo pour 20 000 euros .... mais comme je n'ai pas réussi à réunir cet argent ... :-)
''A noter que cette vraie petite histoire - quoique détournée - n'est pas de mon cru mais de celui-ci d'un ami qui un jour, nous avait dit lors d'un concert de guitare ceci :
"Normalement, je n'aurais pas dû être ici avec vous ! Je devais jouer à Bercy pour 10 000 euros !" ... après un silence invitant les spectateurs à mesurer son geste, que dis-je "son sacrifice!" ... il ajouta : "mais je n'ai pas pu réunir la somme" ... ce qui avait provoqué une explosion de rires. Merci mon ami François Sciortino pour ta générosité.''

L'orage se fait entendre au loin. Quelques gouttes sont tombées mais le champ est terminé. Le propriétaire est rassuré.
Il est temps de rentrer ton carrosse Princesse pour le mettre à l'abri !

Gilles, heureux car tout est dans son geste. Pas besoin de mots pour traduire ce petit geste.
Même la base de son volant semble sourire !!!
Voilà, c'est ici que prend fin cette petite histoire faite autour d'une machine d'exception avec des personnes d'exception. C'est une histoire de passion, d'amitiés, de respect mutuel, de confiance ...
Tous mes remerciements :

  • Au propriétaire que l'on voit ici sur cette photo, pour cette confiance qui m'honore et aussi pour m'avoir une nouvelle fois permis de revivre en trois dimensions mes rêves de gosse,
  • à mon grand ami Gilles Hochart, alias Mac Gyver, pour tous ses conseils techniques, pour son amitié,
  • à Cyril qui m'a fait revivre de grands moments, pour ses explications et pour sa gentillesse,
  • à la société Henon de Frethun et de Looberghe qui me fait rêver en rouge Massey,
  • à mon ami Serge Beck de cette même société qui me laisse approcher ces monstres rouge Massey,
  • et bien sûr, à Florence Hochart, la Princesse de la Moisson qui n'a pas hésité à m'envoyer des SMS pour m'informer des mouvements de cette fabuleuse machine. Merci aussi pour toute cette simplicité bordée de gentillesse qui fait, que je me trouve bien au milieu de l'équipe.

N'oublie pas ce que je t'ai dit Princesse ! Va le plus loin possible dans tes études. Papa et maman vont assurer.

Et grâce à toi, voici trois nouvelles photos, tes photos :

Je crois reconnaître le "pilote" !!! Il a un air de famille avec la Princesse de la Moisson :-)

Attention, une MF 7270 BETA peut en cacher une autre, celle du voisin, monsieur Rahou Jean-Luc.
C'est une situation exceptionnelle que tu as su mettre en valeur ! Tu sais pourquoi maintenant, je t'appelle Princesse de la Moisson :-)

Bien la MF 7270 BETA n'a pas encore livrée tous ses secrets, le propriétaire ainsi qu'Arnaud Coolen, le commercial des Etablissements Henon S.A.S. peuvent avoir le sourire. Le résultat est conforme leurs attentes.

Compte tenu des dimensions de la MF 7270 BETA, celle-ci doit être précédée d'une voiture équipée d'un gyrophare, et d'un panneau "CONVOI AGRICOLE".
Et la relève semble assurée !

Pleins feux sur l'équipe qui sert la MF 7270 BETA.

Encore merci Florence pour ta précieuse aide et tes photos.

Et pour les nostalgiques ... comme moi :-)
Dimanche 3 août en fin d'après midi, je me suis arrêté à la sortie du village d'Haverskerque, entre St Venant et Hazebrouck pour photographier ces cahous, ou cahots ou dijos ...

Beaucoup de souvenirs en les contemplant : on s'amusait à saute mouton, ou encore cela devenait le temps d'un après midi, une cachette, une tente, un campement ...

Lorsqu'on glanait, on arrachait de temps en temps une bonne poignée à ce cahou, histoire de finir plus vite le travail commandé par les parents qui nous envoyaient dans les champs pour ramasser les épis de blé.
Je me suis demandé en regardant tous ces cahous pourquoi continuer à moissonner avec certainement une très vieille machine ! Un passionné ! possible ! mais peut être aussi un champ que l'on a réservé pour montrer le jour des fêtes champêtres, la moisson à l'ancienne : battage du blé ... Il faut "nourrir" les anciennes machines :-)